15 mai 2016 - Raport Campagne de Noël 2015

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                                                                             P. François Reynard

                                                                            Administrateur diocésain

                                                                             1 Rue Hector Berlioz

                                                                             42030 Saint-Etienne

 

Prot. N°45/2016

 

 

Campagne de Noël 2015 - Rapport

Kfarhay, le 15 mai 2016 – Dimanche de Pentecôte

 

Très cher Père François,

Nous avions lancé la campagne de Noël en faveur des enfants, libanais et syriens, scolarisés dans nos établissements publics et qui sont comme des orphelins délaissés par l’Etat et le Ministère de l’Education publique.

J’avais pris sur moi de visiter, accompagné des membres de la Commission diocésaine du service de la charité, notamment les responsables de la Caritas diocésaine, ces établissements déjà avant Noël.

Et j’avais décrit l’état de ces établissements avec le nombre d’élèves, syriens et libanais, qu’ils accueillent ainsi que le dévouement et la solidarité des équipes éducatrices – Directeurs, directrices, instituteurs et institutrices – qui les prennent en charge.

La campagne a été suivie de près par nos diocésains qui sont déjà sensibilisés à la question de l’encouragement et du soutien de l’école publique qui reste l’enfant délaissé de l’Etat. C’est une question de priorité pour la Commission diocésaine de l’Education qui travaille sur la question au sein du synode diocésain. Un nombre d’individus, d’associations civiles et de municipalités se sont joint à la campagne pour soutenir matériellement et moralement nos écoles publiques.

 

Parallèlement, le diocèse de Saint-Etienne, avec qui nous sommes en jumelage depuis dix-neuf ans, a répondu à l’appel et a activement collaboré à cette campagne, par l’intermédiaire de l’administrateur diocésain P. François Reynard (en l’absence de l’évêque), qui avait diffusé officiellement ma lettre aux prêtres et aux paroisses, à l’équipe de jumelage et aux amis.

Nos amis, à travers tout le diocèse, ont été généreux ayant pris à cœur le projet.

Le Père Louis Tronchon, responsable de l’équipe de jumelage sur Saint-Etienne, a été chargé de nous envoyer la somme collectée qui a été de vingt mille cinq cent (20.500) Euros (reçue en trois mandats : le premier de 8.000 Euros le 20 février 2016 ; le deuxième de 9.000 Euros le 26 février ; le troisième de 3.500 Euros le 19 avril).

J’ai repris le chemin des établissements publics en les revisitant, un à un, avec les membres de la commission de la charité, en commençant par Tannourine dans la montagne, jusqu’à Batroun sur le littoral. Nous avons distribué la somme sur les quinze établissements (complémentaires et primaires) accueillant le plus grand nombre d’enfants syriens avec nos enfants libanais et ayant le plus grand besoin, à raison de 600, 1.000 ou 1.500 US dollars pour chaque établissement.

Ce n’était qu’une goutte dans la mer vu les besoins énormes, mais la joie des équipes directrices était telle à nous mettre les larmes aux yeux. Ils sont contents que des amis lointains pensent à eux et veulent les encourager dans leur mission éducative au service de nos enfants et de ceux que nous accueillons en réfugiés, alors que l’Etat ne fait même pas son devoir envers leurs établissements. Les enfants, aussi bien libanais que syriens, nous ont accueillis avec des fleurs et des chants. A Douma, par exemple, deux enfants syriens ont demandé à leur institutrice après notre passage : « Pouvons-nous, nous aussi, offrir à l’évêque un bouquet de fleurs que nous venons de cueillir dans la nature ? ». L’institutrice me rappelle, je suis revenu pour embrasser les deux enfants et les remercier de leur geste si innocent et spontané.

 

Ce qui nous a touchés au cours de cette nouvelle tournée était encore plus impressionnant que la première. Je les énumère rapidement :

 

En premier lieu, le dévouement avec lequel les directeurs, directrices, instituteurs et institutrices se donnent aux enfants, notamment les syriens qui peinent à suivre le programme libanais, et avec quelle patience ils s’appliquent à les comprendre dans leurs traumatismes et à leur passer les valeurs humaines et chrétiennes tout en respectant leurs valeurs musulmanes qui nous sont généralement communes. Nous avons senti le progrès des syriens dans leur tenue, leur politesse, leur propreté et leur respect des autres.

 

En deuxième lieu, la solidarité entre les membres des équipes éducatrices et l’esprit de famille qui règne et rayonne sur les élèves syriens et libanais.

 

En troisième lieu, l’absence de l’Etat et le manque à son devoir envers ces établissements, notamment dans la montagne, qui méritent d’être suivis et soignés comme la pupille de l’œil car cela encouragerait les gens à rester sur leur terre et dans leur montagne et à y vivre dignement au lieu de quitter pour les villes.

 

En quatrième lieu, l’expérience si réussie du collège de Douma qui réserve l’horaire de l’après-midi pour les élèves syriens. Les professeurs savent comment s’adapter à leur niveau et leur donner le maximum, au lieu de souffrir en essayant de faire rattraper les syriens au programme libanais dans la même classe sans grand résultat.

 

En cinquième lieu, la démographie descendante chez les Libanais, et les chrétiens en particulier, face à une démographie galopante des syriens. (Les bureaux des Nations Unies au Liban donnent le chiffre de 250.000 naissances syriennes au Liban en trois ans, 2012-2015, pour 130.000 naissances libanais).

A la visite au collège de Kfarhelda (village chrétien), par exemple, qui accueille 96 enfants syriens pour 13 libanais, je demande à la directrice : « où sont les enfants de Kfarhelda ? »; et elle de me répondre : « nous n’avons pas une seule femme enceinte à Kfarhelda en ce moment ! Les autres sont en ville. ». A l’autre collège de Kour (village chrétien) qui accueille 60 enfants syriens pour 8 libanais, je demande à la directrice : « où sont vos enfants ? » ; et elle de me répondre : « notre collège était sur le point de fermer ; nos familles envoient leurs enfants à Batroun ; nous avons rouvert l’école pour accueillir les enfants syriens dont les familles sont réfugiées chez nous ! ». Et c’est à Kour même, et seulement ici, que nous avons senti combien les enfants syriens, qui ne sont pas suivis de près et avec amour, sont agressifs et même violents !

 

En sixième lieu, les divergences dans les réflexions des instituteurs ou des citoyens libanais sur la question de l’accueil des réfugiés. Les uns s’obstinent à refuser d’accueillir les réfugiés syriens déjà pour leur nombre (1.500.000 pour un total de 4.500.000 que compte la population libanaise), puis pour le passé que nous avons vécu avec l’occupation syrienne en 30 ans. Les autres soutiennent que de toute façon ils sont là malgré notre volonté et avec l’aval des puissances occidentales et arabes; il vaudrait donc mieux les accueillir et, en éduquant leurs enfants, nous gagnerons de bons citoyens au lieu de les avoir comme bandits ou terroristes !

 

Enfin, je ne peux que rendre gloire et louange à notre Dieu – Père, Fils et Esprit-Saint – pour nous donner l’occasion de servir nos frères dans la charité par l’intermédiaire de la générosité de tant d’amis dans le monde. Nous ne sommes finalement que des serviteurs inutiles pour l’accomplissement de Sa volonté et la construction de Son Royaume de justice, de paix et d’amour.

                                                                                                         Mounir Khairallah

                                                                                      Evêque de Batroun


Campagne de Noël 2015

Kfarhay le 14 décembre 2015

 

Très chers amis

La campagne de Noël 2015 a été lancée chez nous comme prévu en faveur des enfants, libanais et syriens, scolarisés dans les établissements publics du département.

J’ai commencé moi-même à rendre visite à ces établissements en créant la joie chez les directeurs, les instituteurs et les enfants qui ne s’attendaient pas à cette initiative de la part de l’Eglise, et de l’évêque en personne.

Nos élèves concernés sont au nombre de 2.194, dont 1.229 (56%) Libanais et 965 (44%) Syriens. Ceux scolarisés dans les établissements privés sont au nombre de 2.950 (dont 2.493 dans les trois établissements de la ville de Batroun).

C’est peu pour un diocèse et pour un département !

 

Le diocèse de Batroun est un petit diocèse qui couvre le département de Batroun, à l’exception des villes côtières et industrielles de Hery et Chekka qui sont passées à l’archidiocèse de Tripoli en 1843. Batroun est à l’entrée de la Région Liban-Nord, à 50 Km au nord de Beyrouth. Le diocèse compte sur les registres un peu moins de 100.000 habitants dont 85% sont des Maronites. Le département est démuni et pauvre pour être loin de Beyrouth où se centralisent l’administration de l’Etat et les sociétés privées alimentant l’économie libanaise. La décentralisation avait été décidée aux Accords de Taëf (1989) qui avaient mis fin (virtuellement) à la guerre au Liban, mais elle n’a jamais été appliquée. Ce qui explique la grande émigration de la population, notamment celle de la Montagne, depuis de longues années vers les pays lointains (Amérique et Australie), et actuellement le déplacement de l’Intelligentsia culturelle et économique de notre département vers Beyrouth où ils cherchent du travail et des écoles pour leurs enfants. Mais en contre partie, notre diocèse est une terre sainte et le diocèse des saints avec les grands sanctuaires du Liban et les lieux rappelant les racines des Maronites, dont le siège du Premier patriarche et fondateur de l’Eglise maronite Saint Jean-Maroun (685-707) qui est actuellement le siège de l’Evêque de Batroun.

Nous sommes depuis deux ans en marche pour un Synode diocésain sur le thème : « Sur les pas de Saint Jean-Maroun et nos saints, nous oeuvrons pour notre renouvellement et notre sanctification par le Christ Jésus ». Dix-sept commissions (engageant plus de trois cent cinquante personnes, prêtres, religieux, religieuses et laïcs de toute spécialisation et emportant dans le mouvement synodal tous les secteurs du diocèse) travaillent sur les thèmes proposés par le Synode Patriarcal Maronite (conclu en 2006 et qui a mis notre Eglise sur le chemin du renouveau) que nous essayons de recevoir et d’appliquer dans notre diocèse.

L’année sainte de la Miséricorde, que j’avais inaugurée le samedi 12 décembre sera pour nous la troisième et dernière année du synode diocésain.

 

Notre diocèse compte soixante six paroisses (dont la grande majorité sont de toutes petites paroisses) desservies par trente prêtres (17 ont moins de 50 ans ; 18 sont mariés), auxquels il faut ajouter huit prêtres à la retraite. Nous avons douze séminaristes. C’est une grâce. Notre diocèse est connu pour être très généreux en vocations, sacerdotales et religieuses. Il a donné ces quarante dernières années plus de trente-cinq prêtres à d’autres diocèses. Les congrégations religieuses, masculines et féminines, sont très présentes dans le diocèse et détiennent des institutions scolaires et sanitaires (écoles, dispensaires, orphelinat, maisons de repos…) et surtout les sanctuaires qui sont une référence nationale et internationale.

 

Nous avons choisi, pour la campagne de Noël, les établissements publics, parce qu’ils sont les « éternels orphelins et délaissés » de l’Etat, et les enfants de familles « démunies » qu’ils accueillent, libanais et réfugiés syriens. Les bureaux de l’ONU au Liban (UNRWA) avaient promis des aides aux réfugiés syriens en dizaines de millions de dollars, mais presque rien n’est arrivé « faute de financement » !

Parmi ces établissements, certains sont modernes, d’autres sont démunis, mais la totalité manque de financement de l’Etat, donc de matériel et d’équipements. Les directeurs et directrices, instituteurs et institutrices de ces établissements constituent une « famille éducatrice » par leur solidarité et se donnent à fond en se dévouant pour donner les meilleurs résultats ; et ils y arrivent. Ils ont été surpris par l’afflux de réfugiés syriens, mais ils se sont repris et accepté de scolariser les enfants syriens tout en courant le risque de subir la baisse très sensible du niveau scolaire car les syriens viennent d’un tout autre système scolaire. Certains ont été même inventifs ! Je prends le seul exemple du Collège de Douma en montagne (à 1.100 m d’altitude) qui accueille 158 élèves des villages avoisinants pour un horaire normal, et 125 élèves syriens pour un horaire extraordinaire dans l’après-midi. Le corps professoral a accepté d’assurer les deux horaires, de 7h30 à 19h00. Quel héroïsme et quel témoignage ! Avec la seule promesse de l’UNRWA de toucher 20.000 LL (10 Euros) par jour.

Notre campagne consiste donc à recueillir les fonds pour soutenir autant que l’on peut les écoles et les familles les plus démunies.

Cela ne nous empêche pas de poursuivre notre action comme tous les ans, avec la commission diocésaine du service de la charité, auprès des familles que nous aidons habituellement et dont le nombre augmente sensiblement.

 

Nous sommes sûrs de toute façon, en nous tenant auprès des familles réfugiées, d’être tout près de la famille de Nazareth réfugiée à Bethléem, car Marie, à l’accouchement de son fils Jésus, devait « l’emmailloter et le déposer dans une mangeoire, parce qu’il n’y avait pas de place pour eux dans la salle d’hôtes » (Luc 2, 7).  

Je vous reste uni dans la prière.

Père Mounir

 

P.S. : Je vous envoie la liste des établissements publics et le nombre de leurs élèves.

 

Nombre des élèves dans les établissements publics du

Département de Batroun

 

 

                                                     Lib.                  Syr.                  Total

 

      1. 1)Lycée de                                                         175                 ----                      175
  1. 2)Collège Estéphan Attieh de                          127                 50                  177
  2. 3)Collège des Filles de                                     53                56                  109
  3. 4)Maternelle de                                                 65                58                  123
  4. 5)Lycée technique de                                        112                12                  124
  5. 6)Ecole primaire de                                          21                  20                  41
  6. 7)Collège de                                                    32                   78                  110
  7. 8)Lycée de                                                     79                      1                  80
  8. 9)Collège de                                                  110                 12                  122
    1. 10)Collège de                                                     59                   61                  120
    2. 11)Collège de                                                   28                   28                  56
    3. 12)Collège de                                                   7                   79                  86
    4. 13)Collège de                                                  8                    60                  68
    5. 14)Collège de                                                 13                    96                  109
    6. 15)Lycée de                                                   29                   ---                    29
    7. 16)Collège de                                            145                   13                  158

Horaire après- midi :                                 ---                   125                 125

  1. 17)Lycée technique de                                   48                      1                  49
  2. 18)Lycée de                                                  76                   ---                    76
  3. 19)Collège de                                             42                    15                  57
  4. 20)Association offre-joie                        ----                   200                 200

                                                           Total :           1229               965              2194

                                                           %                   56 %              44 %              100

 

 

Nos élèves dans les établissements privés sont au nombre de 2.950 (dont 2.493 dans les trois établissements de la ville de Batroun)