Lettre de Noël 2013

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Lettre de Noël 2013

 

 

 

« Quant à Marie, elle retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur » (Luc 2,19).

Très chers amis,

Mardi 24 décembre 2013, 22h30. Je vous écris cette lettre de Noël alors que je m’apprête à aller célébrer la Messe de Minuit à Tannourine, dans la haute montagne, sous la neige et le verglas, avec ceux qui s’accrochent à leur foi, à leur terre et à leurs valeurs.

« Edifier la paix en terre libanaise en particulier, et au Machrek est une grave responsabilité qui nous incombe, nous les fils de ce Machrek. Car Dieu a choisi cette région pour y apparaître en la personne de son Fils Jésus-Christ. C’est sur cette terre que Dieu s’est incarné. C’est sa terre. Nous n’avons donc pas le droit de l’abandonner, de la déserter ou de la remplacer par une autre », dit Sa Béatitude le patriarche Raï dans son Message de Noël.

« Nos cloches continueront de résonner avec force, malgré les vicissitudes de l’histoire. Notre Eglise ne cèdera pas à la panique et ne désertera pas l’Orient », dit Sa Béatitude le patriarche Yazigi.

Nous continuerons donc d’annoncer le mystère de Dieu fait homme et la joie de le savoir homme comme nous et avec nous.

 

 

 

1)    Le mystère de Dieu révélé par la naissance de son Fils Jésus Christ

Le mystère de Dieu Amour, nous a été révélé par le Fils Jésus Christ. Et la promesse de Dieu a été réalisée par la naissance du Fils Jésus Christ homme comme nous et parmi nous.

L’humanité vivait depuis des milliers d’années dans l’attente de la venue du Sauveur, et Dieu poursuivait le chemin de l’Economie du Salut avec le peuple qu’Il s’est choisi par l’intermédiaire des patriarches et des prophètes.

Quand le temps est venu, alors que les gens étaient occupés et préoccupés par leurs travaux, leurs soucis et leurs intérêts, l’Empereur César Auguste fait publier depuis Rome un décret pour recenser le monde entier ; et Quirinius, gouverneur de Syrie, n’avait qu’à s’exécuter. « Tous allaient se faire recenser, chacun dans sa propre ville ». Et « Joseph, qui était de la famille et de la descendance de David, devait descendre de Nazareth en Galilée où il vivait jusqu’à Bethléem en Judée pour se faire recenser avec Marie son épouse, qui était enceinte ».

Joseph et Marie sont arrivés à Bethléem comme des étrangers parce qu’ils n’avaient pas où se loger et « il n’y avait pas de place pour eux dans la salle d’hôtes ». « Et pendant qu’ils étaient là, le jour où (Marie) devait accoucher arriva ; elle accoucha de son fils premier-né, l’emmaillota et le déposa dans une mangeoire ».

Marie savait dans son cœur que son fils est Jésus Christ le Sauveur promis ; qu’Il est « le fils du Très Haut, que le Seigneur lui donnera le trône de David son père, qu’il règnera pour toujours sur la famille de Jacob, et son règne d’aura pas de fin », comme l’ange le lui avait annoncé. C’est le mystère de Dieu né homme. Mais elle « retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur », en laissant à Dieu de poursuivre son projet de salut.

Dans le silence de Marie et les ténèbres de la nuit, une lumière a jailli du ciel et un ange s’est présenté aux bergers « qui vivaient aux champs et monta      ient la garde pendant la nuit auprès de leur troupeau » et leur dit : « soyez sans crainte. Car voici je viens vous annoncer une bonne nouvelle, qui sera une grande joie pour tout le peuple : il vous est né aujourd’hui, dans la ville de David, un Sauveur qui est le Christ Seigneur ». C’est l’annonce du mystère de Dieu qui a choisi de naître dans la pauvreté expatrié, dans son propre pays étranger, et dans une mangeoire loin des palais des rois, Lui qui est le Roi des rois.

Tour cela parce qu’Il a voulu, par sa naissance, embrasser l’humanité entière : depuis le plus pauvre jusqu’au plus riche, depuis le plus petit jusqu’au plus grand, et depuis le plus humble jusqu’au plus haut placé. Son amour pour les hommes a fait qu’Il abandonne sa divinité pour devenir homme et adopter l’humanité faible et pécheresse et l’enrichir, la libérer par sa mort et sa résurrection et l’élever jusqu’à  sa divinité. C’est le mystère de Dieu révélé aux bergers de Bethléem et à ceux qui voudraient le croire.

Les premiers témoins de l’annonce de ce mystère furent : En premier lieu, les anges dans le ciel qui se sont mis à louer Dieu et le chanter en disant : « gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes qu’Il aime ». En second lieu, les bergers sur la terre qui se mirent à « chanter la gloire et les louanges de Dieu ». En troisième lieu, Marie qui retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur.

Son propre peuple et les proches, qui étaient sensés l’attendre et se précipiter à sa rencontre, ne l’ont pas reconnu ou ne voulaient pas le reconnaître ; car ils attendaient un roi fort et puissant pour restaurer la royauté d’Israël. Ils ont été déçus ; ils l’ont alors laissé à son sort. Alors que de très loin, du pays des Perses, les rois mages sont venus pour « lui rendre hommage et lui offrir en présent de l’or, de l’encens et de la myrrhe ».

 

 

2)    Jésus renaît aujourd’hui sur sa terre natale et au milieu de son peuple

Il est vrai que Jésus, Fils de Dieu, est né une fois pour toute en entrant dans l’histoire et la géographie à travers la famille de Nazareth à Bethléem en Judée, en Palestine et en Syrie. Mais il continue de naître tous les ans et tous les jours ; et il renaît aujourd’hui sur sa terre natale qu’Il a voulu la terre de la paix, de l’entente et de la convivialité. Il renaît au milieu de son peuple qu’Il a voulu le peuple de Dieu renouvelé dans l’amour, la justice et la paix.

Mais cette terre ne cesse d’être, depuis deux mille ans, l’arène de tant de guerres aveugles et meurtrières et le champs de bataille d’un feu constamment allumé ; et ce peuple ne cesse d’être victime d’occupation, de destruction et de persécution à cause de l’exécution des complots et des intérêts des empereurs et des sultans de ce monde, de César Auguste à Quirinius, à Hérode, à Pilate, et à tant d’autres sous de nouveaux noms. Et nos peuples continuent de payer très cher le prix de ces guerres par la mort, la persécution, l’oppression et l’expatriation sans avoir le droit de vivre dans la dignité sur leur propre terre ou de décider librement de leur sort.

Ils sont des millions, chrétiens et musulmans, à subir ce sort en Egypte, en Palestine, en Jordanie, en Syrie, en Turquie, en Iraq ou au Liban. Ils  vivent dans une situation déplorable, et ils n’ont d’abri que des tentes provisoires et privées de tous les éléments d’une vie digne.

Les responsables de ce monde, de nos pays moyen-orientaux et du Liban apprendront-ils la leçon, et accepteront-ils de s’abaisser et de renoncer à leurs intérêts personnels pour permettre au Liban de renaître, et aux pays de notre région de connaître enfin la sécurité, la tranquillité et la paix véritable afin que leurs citoyens, tous leurs citoyens, reviennent pour vivre ensemble dans l’entente, le respect et la liberté ?

 

 

3)    Et au Liban aussi … Jésus renaît

Le Liban ne cesse de payer très cher les conséquences de la guerre en Syrie et dans  la région, et ce à tous les niveaux : social, économique et sécuritaire.

Le gouverneur de la Banque du Liban, Dr Riad Salamé, a précisé au cours d’une interview hier que l’accueil des réfugiés syriens, (plus d’un million, pour une population totale de trois millions et demi de Libanais), a coûté à l’Etat libanais, jusqu’à maintenant, 7,5 milliards de dollars ! C’est très lourd ! Et l’aide internationale promise n’arrive qu’à compte goutte.

Mais nous avons le devoir de les accueillir malgré tout ce que nous avons enduré durant les vingt-neuf ans d’occupation syrienne ; car nous savons très bien ce que veut dire qu’être réfugié ou expatrié pour l’avoir expérimenté durant de longues années. Est-ce leur faute s’ils sont réfugiés ? Et ce sont nos frères !

Cette situation a eu des répercussions directes sur la campagne de Noël à Batroun qui a été moins généreuse cette année. On le comprend ; les gens doivent se serrer la ceinture ou sont totalement démunis. Mais cela n’a pas empêché les membres de la commission diocésaine du service de la charité de mener jusqu’au bout leur campagne auprès des familles les plus nécessiteuses et d’englober même les enfants syriens dans nos écoles de Batroun et du département à qui ils ont distribué des jouets en plus des rations alimentaires.

En ce qui me concerne, je viens de terminer mes visites de la charité dans la grande discrétion, comme d’habitude, auprès des familles habituelles et d’autres nouvelles, dont certaines familles syriennes en plus des trois que nous accueillons à la résidence épiscopale à Kfarhay. Elles n’ont cessé de me donner des leçons de grandeur d’âme et de dignité.

Je viens de terminer aussi mes visites aux malades dans les deux hôpitaux du diocèse : celui de Batroun et celui de Tannourine.

Une nouveauté tout de même : j’ai tenu à rendre visite aux prêtres âgés de mon diocèse. Ce qui leur a fait plaisir ainsi qu’à leur famille pour ceux qui sont mariés. « C’est à nous de vous rendre visite ; mais vous nous faites la surprise de venir jusqu’à nous », m’ont-ils dit.

C’est dans ces conditions que Jésus renaît cette année au milieu de nous et en chacun de ses frères démunis et réfugiés. Mais arriverons-nous à le reconnaître ? Ou bien le laisserons-nous à son sort pour revenir à nos problèmes et nos préoccupations ? Réussirons-nous à écouter, en cette nuit et dans les ténèbres de la violence, de la haine et de la vengeance, l’ange de Dieu nous annoncer une grande joie qui sera pour tous nos peuples : Soyez sans crainte, vos pays vont renaître dans la paix tant désirée, la Paix du Roi de la Paix ?

 

 

   Conclusion

 

Ce qui nous réconforte enfin est de savoir que nous sommes soutenus par les prières de tant de nos amis à travers le monde et par leur générosité.   

Une campagne de solidarité avec le Liban et les réfugiés syriens au Liban a été lancée dans le diocèse de Saint-Etienne par son évêque Mgr Dominique Lebrun, qui a diffusé un « appel urgent pour l’aide aux Libanais démunis et aux réfugiés syriens dans le diocèse de Batroun », et soutenue par l’équipe du jumelage.

Nous gardons donc fortes notre foi et notre confiance en Celui qui a dit : « n’ayez pas peur, j’ai vaincu le monde… et je suis avec vous jusqu’à la fin des temps ».

 

Au milieu de notre nuit, une lumière va jaillir et les bergers, nos bergers le Pape François et nos patriarches, vont nous conduire jusqu’à la crèche pour renaître avec Jésus et chanter les louanges de Dieu fait homme pour nous sauver.  

C’est notre espérance ; c’est notre souhait pour Noël 2013. Et c’est ce que nous demandons à Dieu par l’intercession de Marie qui continue de retenir tous ces événements dans son cœur et d’intercéder pour nous.